[Film] « Avatar », de James Cameron

Forum elbakin.net, 8 janvier 2010.

Vu hier. En 3D, naturellement (mon premier film en 3D, et j’espère pas le meilleur).
C’est un très beau nanard…

Visuellement, c’est pas mal, ça va du moyen au très bon selon les séquences. On sent quand même lourdement l’ordinateur, un peu comme dans les derniers Star Wars, et les choix graphiques pour les animaux et les plantes donnent des résultats très variables, allant du très beau au « Pitié, j’ai mal aux yeux… ». Certaines ambiances colorées font penser à des posters cheap avec du bleu nuit, du violet et du rose et des effets lumineux faciles (i.e. même pas spécialement beaux). Et certains plans sont ruinés par une mise en scène pas spécialement raffinée…

(spoiler : exemple : les montagnes volantes de l’affiche : on a une belle montée en puissance avec le dialogue entre les personnages, puis le vol et l’arrivée devant les monts flottants ; les personnages découvrent les monts Hallelujah, plan large sur les rochers volants, bouches ouvertes des personnages… et c’est déjà fini. J’ai eu l’impression de les voir à peine, alors que pour le coup c’était beau.)

(spoiler : autres exemples : certains plans larges, vers la fin, sur la flotte des vaisseaux approchant des montagnes, ou bien sur les ikrans, sont ruinés par des effets d’ajustement de zoom complètement inutiles.)

Les Na’vis sont très crédibles, très humains… beaucoup trop proches des humains ! Au point qu’on a parfois l’impression de voir des acteurs grossièrement maquillés. Pour une peuplade lointaine, ça aurait marché, mais pour une espèce extra-terrestre, ce n’est pas génial.

Restent les vaisseaux, les engins et les décors des jungles de Pandora, qui sont en effet superbes (sauf les passages en violet et rose).

L’univers ? Passable. L’aspect visuel est bien, oui, pas de problème. Mais Pandora est un monde très classique, ce qui pourrait quand même donner quelque chose de très bien si le background ne restait pas aussi affreusement simpliste. Deux ou trois décors, deux ou trois créatures, un cadre général beaucoup trop terrien (la jungle) avec quelques plantes assez jolies, mais, au niveau créativité, ça n’atteint pas la cheville d’un Dark Crystal. Le tout sous-tendu par un symbolisme lourdingue au possible qui n’a aucun scrupule à utiliser des ficelles énormes déjà archi rebattues :

(spoiler) l’arbre-monde, le coup du « Mais en fait tout ça forme un réseau », la divinité simili-Gaia (évidemment ils sont monothéistes et évidemment c’est une déesse-mère) qui fournit d’ailleurs opportunément le deus ex machina de la fin, sans oublier l’élément le plus nanar du monde : les animaux USB. (/spoiler)

Et les Na’vis sont têtes à claque au possible : le cliché du peuple proche de la nature, au niveau technologique bas (aucune trace d’une évolution technologique, naturellement), réduit à une religion (aucune tension politique ou sociale, pas d’économie, pas de rivalité avec les voisins…), avec une culture réduite au minimum syndical (quelques colifichets génériques au possible, c’est tout ce qu’on verra de leurs arts), incapable de prendre des décisions par lui-même sans l’intervention du Bl- heu, Terrien venu de l’extérieur, et dont on retourne l’opinion comme une crêpe sans aucun problème, puisqu’il se comporte comme un bloc de foule soudé derrière un ou deux « vrais » personnages qui sont les seuls à avoir un minimum de volonté (et encore). Bref, le cliché du personnage collectif muet et télécommandé par les personnages principaux…

J’avais entendu le pire au sujet du scénario, et j’avais très peur, mais j’ai plutôt bien accroché… pendant la première demi-heure. Hélas, le film durait 2h40, et le scénario est devenu de plus en plus à baffer. C’est un amoncellement de clichés usés jusqu’à la corde, complètement téléphoné, bourré d’incohérences et d’invraisemblances plus grosses que le budget du film et si évidentes que ça en devient indécent. Le tout mortellement sérieux (ou alors drôle involontairement). On m’avait dit que c’était outrageusement copié sur Pocahontas : on avait eu raison. J’ajoute que si vous avez vu le dessin animé récent Mia et le migou, c’est exactement la même histoire, avec exactement le même pseudo-écologisme affreusement moralisant et culpabilisateur qui semble à la mode en SF/fantasy en ce moment (l’homme est forcément opposé à la nature, d’ailleurs la Nature va finir par tous nous tuer et ce sera bien fait pour nous ! *coups de fouet répétés*).

Bref, j’ai eu l’impression très agaçante de voir un film qui prend le spectateur pour un crétin, qui lui parle comme à un petit enfant, et qui n’hésite pas à sacrifier au passage l’univers et le scénario à un esprit allégorique moralisant dépourvu de toute nuance. Pour les gens qui n’ont jamais vu/lu de SF ou de fantasy, et qui ne verront pas à quel point c’est bourré de clichés, ça passera peut-être pour une belle fable écologique. Mais pour quelqu’un qui a un minimum l’habitude des (bons) univers de SF/fantasy, Avatar ressemblera surtout à un énorme gâchis de temps et de moyens, alors même que la trilogie du Seigneur des Anneaux et plusieurs autres bons films des années suivantes avaient montré que ce n’est pas parce qu’on a un gros budget et qu’on vise un large public qu’on est obligé de restreindre le scénario à un truc à peine digne d’être vu par un enfant de 5 ans.

Je continue à rêver à ce qu’un Spielberg aurait pu faire avec un sujet pareil… pas forcément beaucoup mieux, mais au moins la réalisation aurait été meilleure et le scénario un minimum décent…

Laisser un commentaire