Aimé Césaire, « Cahier d’un retour au pays natal »

2 septembre 2012

Couverture de "Cahier d'un retour au pays natal" d'Aimé Césaire

Quatrième de couverture de l’édition Présence africaine :

« Et nous sommes debout maintenant, mon pays et moi, les cheveux dans le vent, ma main petite maintenant dans son poing énorme et la force n’est pas en nous, mais au-dessus de nous, dans une voix qui vrille la nuit et l’audience comme la pénétrance d’une guêpe apocalyptique. Et la voix prononce que l’Europe nous a pendant des siècles gavés de mensonges et gonflés de pestilences,

car il n’est point vrai que l’œuvre de l’homme est finie

que nous n’avons rien à faire au monde

que nous parasitons le monde

qu’il suffit que nous nous mettions au pas du monde

mais l’œuvre de l’homme vient seulement de commencer et il reste à l’homme à conquérir toute interdiction immobilisée aux coins de sa ferveur

et aucune race ne possède le monopole de la beauté, de l’intelligence, de la force

et il est place pour tous au rendez-vous de la conquête et nous savons maintenant que le soleil tourne autour de notre terre éclairant la parcelle qu’à fixée notre volonté seule et que toute étoile chute de ciel en terre à notre commandement sans limite. »

La réédition du Cahier d’un retour au pays natal, la première œuvre d’Aimé Césaire, saluée depuis l’origine comme le texte fondamental de la génération de la Négritude.

 Mon avis :

 Comme beaucoup de gens sans doute, j’ai découvert ce poème au moment de la mort de Césaire en 2008. Arte avait alors diffusé une lecture du Cahier par l’acteur Jacques Martial, qui s’en acquittait avec beaucoup de talent. Il faut croire que c’était une très bonne introduction au Cahier, puisque cela m’a donné envie de le lire. Il s’agit d’un seul long poème qui alterne la prose et les vers libres (pas de mètre, pas de rimes), où la poésie naît de l’affirmation de la voix du poète et de la langue extraordinairement imagée qu’il élabore.

 J’ai donc entamé le Cahier d’un retour au pays natal un soir, avec l’idée d’en lire simplement les premières pages, mais j’ai été scotché par le souffle puissant du texte. Je crois qu’on rapproche souvent ce poème de l’œuvre de Rimbaud, et la comparaison n’est pas injustifiée : c’est un déploiement d’énergie extraordinaire, avec des images multiples et frappantes, et surtout une voix qui s’affirme et lutte pour ses idées. On est à mille lieues du poète replié dans l’art pour l’art loin de la vie commune : ici, on est de plein pied dans le monde, en plein combat politique.

 Le texte est extraordinairement riche, dans sa syntaxe et son vocabulaire. De nombreux mots m’étaient inconnus, mais je pense qu’il ne faut pas s’en formaliser pour une première lecture : mieux vaut se laisser porter par la voix de Césaire, quitte à revenir ensuite sur le texte pour l’approfondir si l’on veut. J’en suis resté pour le moment à cette première lecture, mais c’est typiquement le genre d’œuvre sur lequel j’aimerais avoir un cours. Je n’en aurai sans doute pas l’occasion, mais apparemment, depuis quelques années, plusieurs commentaires sur l’oeuvre de Césaire ont été publiés, donc il doit être possible de se renseigner plus avant sur le poème sans trop de problème. En attendant, l’édition du poème chez Présence africaine le fait suivre de la préface d’André Breton à l’édition de 1947, qui offre un premier éclairage sur le contexte de la publication du Cahier, dont la première version est parue en 1939.

Je n’ai pas – pour le moment – de longue analyse intelligente à proposer sur ce texte : je connais encore très mal cet auteur et le courant littéraire auquel il se rattache. C’est donc, pour une fois, moins une critique qu’une première impression que je vous donne ici… et (surtout) une invitation à découvrir cette œuvre ! C’est un poème d’une grande force et d’une grande richesse. Je ne sais pas si cette accumulation de puissance, ces images frappantes, ce vocabulaire chamarré peuvent plaire à tous les lecteurs, mais il faut y mettre le nez !

Message posté sur le forum Le Coin des lecteurs le 6 octobre 2011, rebricolé ensuite.


Homère, « L’Odyssée »

5 août 2012

Ceci est une présentation d’un grand classique. Si vous n’y connaissez rien, restez, c’est fait pour !

L’Odyssée est l’un des premiers textes littéraires de la littérature mondiale (nettement après l’épopée de Gilgamesh, quand même), et une très belle épopée racontant un fameux épisode de la mythologie grecque. J’avais déjà présenté l’Iliade il y a quelques jours : l’Odyssée en constitue une suite indirecte, puisque l’Iliade se termine avant la prise de Troie, tandis que l’Odyssée commence bien après la fin de la guerre… mais elle contient beaucoup de retours en arrière et de rappels qui complètent vraiment bien l’Iliade (la prise de Troie, justement, est évoquée en quelques vers). Le lecteur de l’Iliade se trouve en terrain familier, puisqu’on revoit plusieurs des héros de la guerre de Troie à divers moments de l’épopée. Cependant, il est possible de lire l’Odyssée sans avoir lu l’Iliade, chacune formant une histoire autonome.

 L’histoire

L’intrigue se déroule à la fin de la guerre de Troie, au cours de laquelle une gigantesque armée d’Achéens venus de tous les coins de la Grèce était venue réclamer Hélène, la femme de Ménélas, roi de Sparte, enlevée par Pâris, l’un des fils de Priam, roi de Troie, en Asie Mineure. De nombreux héros valeureux se sont joints à Ménélas et à son frère Agamemnon dans l’expédition. Parmi ces héros, Ulysse, roi d’Ithaque, a dû laisser sa femme Pénélope et son tout jeune fils Télémaque au moment de partir pour la guerre.

Après dix années de siège, la ruse du cheval de Troie a finalement donné la victoire aux Achéens. Troie est détruite, Hélène retourne à Sparte, et les héros victorieux peuvent rentrer chez eux. Mais le voyage de retour est souvent difficile, et pour Ulysse, ce sont dix nouvelles années d’aventures périlleuses qui vont s’écouler avant qu’il ne soit enfin de retour chez lui.

Entraîné par une tempête au delà des frontières du monde connu, Ulysse doit faire face à toutes sortes de peuples et de créatures étranges, certains bienveillants, d’autres hostiles. De l’île des Cyclopes à celle de Circé, du rocher des Sirènes jusqu’au pays des morts ou à celui des Phéaciens, il doit compter sur sa ruse et sur l’aide de la déesse Athéna pour surmonter ces épreuves et retrouver la route du retour.

Pendant ce temps, à Ithaque, Ulysse passe pour mort. Des dizaines de prétendants issus de la noblesse de la région convoitent Pénélope et le trône d’Ithaque. Mais Pénélope tient bon, employant elle aussi la ruse pour se tirer d’affaire. Télémaque, devenu jeune homme, part en quête d’informations sur le sort de son père. Lorsque le fils et le père se retrouvent, l’heure de la vengeance contre les prétendants sonne enfin. Mais comment s’y prendre, quand on est deux ou trois contre une centaine d’hommes ? Même une fois de retour à Ithaque, Ulysse est loin d’être tiré d’affaire…

Mon avis

On ne présente pas l’Odyssée… mais je l’ai fait quand même, parce que c’est une très belle histoire qui donne envie de raconter ! L’Odyssée est un grand classique de la littérature, oui, mais en plus je crois que c’est l’un des textes antiques les plus accessibles et qui a le mieux vieilli. Mieux que l’Iliade, je trouve, qui est plus belliqueuse et très « archaïque » dans sa façon de penser.

Dans l’Odyssée, au contraire, Ulysse se bat avant tout pour se défendre et pour survivre (en essayant de sauver ses compagnons). Il n’aspire qu’à rentrer chez lui et à vivre en paix. On voyage beaucoup, il y a du merveilleux, et Ulysse rencontre toutes sortes de divinités parfois peu connues, qui font découvrir autre chose que les grands dieux que tout le monde connaît. Chaque étape de son voyage peut être lue à plusieurs niveaux : au premier degré, c’est un récit merveilleux qui n’a rien à envier à la fantasy actuelle, et en même temps l’ensemble donne à penser sur beaucoup de choses.

Le récit est limpide et bien mené : toutes les grandes techniques de narration sont déjà là, changements de lieux et de points de vue, retours en arrière, etc. La langue homérique est limpide, pleine de formules qui ont conservé toute leur poésie. J’ai lu quelque part dans un commentaire sur un site marchand qu’il y a des « tics de langage »… alors, comment dire, non, pas du tout : l’Odyssée, comme l’Iliade, a été composée par oral, sans recours à l’écrit, par un ou plusieurs aèdes qui utilisaient un système qu’on appelle les « vers formulaires », dont ces répétitions sont la partie la plus visible dans une traduction. Au départ, tout ça est composé en vers, hein !

(Voyez sur Wikipédia l’article « Théorie de l’oralité »pour plus de détails là-dessus. C’est une technique qui n’a aucun équivalent dans la plupart des sociétés contemporaines : pas évident de se représenter un pareil chef-d’œuvre conçu par des gens qui ne savaient ni lire ni écrire !)

La traduction en vers libres de Jaccottet aux éditions La Découverte est une bonne traduction récente.

Quelle traduction ?

J’ai lu et relu cette œuvre plusieurs fois, dans plusieurs traductions. Voici les principales, qui ont chacune ses qualités et ses défauts :

– La traduction de Victor Bérard est en prose, mais avec un rythme d’alexandrins (ce sont des « alexandrins blancs »). C’est une belle langue classique, et ses formules de traduction ont influencé pas mal d’auteurs français du XXe siècle. Mais il est parfois assez suranné dans ses choix de traduction (sa traduction remonte à 1924). On trouve souvent cette traduction dans les grandes collections de poche.

– Une traduction en vers libres, par Philippe Jaccottet (lui-même poète), est parue plus récemment en 1955 et est actuellement éditée aux éditions La Découverte. C’est vraiment beau, et, malgré quelques tournures obscures ici ou là dont il ne faut pas s’effrayer, il s’en dégage une atmosphère poétique très agréable.

– Une autre traduction en prose qui peut être bien pour commencer, c’est celle de Louis Bardollet en « Bouquins » Robert Laffont, dans un volume qui comprend aussi l’Iliade et contient quelques compléments utiles (introduction, cartes, index des personnages, etc.). C’est une traduction à la fois très accessible et proche du texte original. L’inconvénient, c’est que certains de ses choix de traduction m’ont paru moins beaux, mais c’est une question de goûts.

Bon, il existe bien sûr pas mal d’autres traductions, mais ça peut vous aider à choisir celle qui vous convient le mieux.

Voilà, personnellement j’aime énormément l’Odyssée, et je pense que s’il y a un texte grec ancien qu’il faut avoir lu et qu’on peut découvrir sans trop de difficultés, c’est celui-là, alors n’hésitez pas à vous lancer !

Pour découvrir en douceur

Pour les plus jeunes, il y a, comme pour l’Iliade, toutes sortes de livres pour la jeunesse qui constituent des introductions possibles à l’Odyssée, parfois fort bien faites. Un classique du genre est Contes et récits tirés de l’Iliade et de l’Odyssée, qui raconte l’histoire des deux épopées sous forme de courts chapitres (en prose, naturellement). Mais il y en a beaucoup d’autres, notamment sous forme de beaux livres illustrés, adaptés à tous les âges.

Et les films ? Eh bien, je ne connais pas de film ou de téléfilm facilement accessible qui donnerait une idée vraiment fidèle de l’histoire de l’Odyssée (sauf peut-être ce téléfilm italien en plein d’épisodes dont je n’ai pas encore réussi à retrouver la référence, mais il a l’air introuvable en vidéo de toute façon…). En revanche, disons dans le genre « belle infidèle », il y a le péplum Ulysse de Mario Camerini, qui remonte à 1954, mais se laisse bien regarder, avec Kirk Douglas dans le rôle-titre. Le scénario s’écarte à plusieurs reprises de l’épopée originale, il en passe sous silence plusieurs épisodes et en fusionne d’autres, mais ses innovations sont intelligentes et même ingénieuses. Mieux vaut tout de même avoir au moins lu une version jeunesse ou un résumé détaillé avant de le regarder, pour pouvoir apprécier ces choix qui réinventent toute une partie de l’histoire.

Si vous avez aimé, vous apprécierez sans doute…

– Eh bien, l’Iliade, si vous ne l’avez pas encore lue. Plus sombre et plus martiale, mais le même souffle épique, les mêmes formules hautes en couleurs, le même rythme bien équilibré.

– Pour une aventure mythologique quelque part entre l’Iliade et l’Odyssée, allez donc mettre le nez dans l’Énéide de Virgile. Énée, prince de Troie, quitte les ruines de sa ville avec un groupe de survivants et part en quête d’un pays où fonder une nouvelle Troie : après toutes sortes de péripéties, il arrivera en Italie, dans le Latium, où ses descendants fonderont… Rome. C’est une esthétique différente (celle de la poésie latine de l’époque d’Auguste, le premier empereur romain, au Ier siècle après J.-C.), mais le souffle épique est bien là, et c’est l’une des meilleures émules d’Homère.

– Toujours parmi les épopées antiques, il y a des épopées moins connues que celles d’Homère et de Virgile, mais encore plus riches en merveilleux mythologique : allez donc voir les Argonautiques d’Apollonios de Rhodes, une épopée composée au IIIe siècle av. J.-C. par un érudit de la bibliothèque d’Alexandrie, et qui raconte la quête de la Toison d’or par Jason et les Argonautes. Entre la cinquantaine de héros formant l’équipage, les multiples péripéties du voyage (les Harpyies, les roches Planctes qui brisent les navires, les rencontres avec des peuples hostiles), les épreuves imposées à Jason pour conquérir la toison, sa rencontre avec la magicienne Médée, et j’en passe, vous n’aurez pas le temps de vous ennuyer ! Seul défaut potentiel de l’épopée pour un lecteur d’aujourd’hui : quelques développements sur la géographie qui peuvent ne pas passionner. Mais au pire, sautez-les et ne vous privez pas du reste pour si peu ! Disponible uniquement dans la Collection des universités de France (C.U.F.) pour le moment, donc plutôt à emprunter en bibliothèque (j’espère qu’il y aura une traduction plus accessible bientôt !). EDIT le 18 août 2019 : Il a fallu attendre sept ans, mais les Belles-Lettres viennent de publier une édition des Argonautiques en traduction seule qui reprend la traduction de la C.U.F. en un seul volume, au prix modique de 21 euros. C’est le même prix qu’un roman de fantasy grand format et ça vaut largement le détour.

– Et du côté télévision, allez jeter un œil à Ulysse 31, cette série animée franco-japonaise culte des années 1980 qui transpose (très) librement les aventures d’Ulysse dans un univers de science-fiction haut en couleurs…


Homère, « L’Iliade »

1 août 2012

Ceci est une présentation d’un grand classique. Si vous n’y connaissez rien, restez, c’est fait pour !

L’histoire :

Un mot de contexte en cas de besoin…

Ça ne fait pas de mal de rappeler un peu le contexte de la guerre de Troie. Hélène, épouse de Ménélas, roi de Sparte (dans le Péloponnèse), a été enlevée par Pâris, prince de Troie, une puissante ville d’Asie Mineure (l’actuelle Turquie).

Or Hélène est la plus belle femme du monde, et, au moment de ses noces, son père, Tyndare, soucieux d’éviter les problèmes, avait persuadé tous ses anciens prétendants – parmi lesquels se trouvaient la plupart des rois des principales cités grecques – à s’engager par serment à venir en aide à l’époux si Hélène était enlevée ou réclamée par quelqu’un d’autre.

Au moment de l’enlèvement d’Hélène, Ménélas envoie des émissaires partout en Grèce pour rappeler leur serment aux rois. De tous les coins de la Grèce, les cités envoient des contingents de troupes, commandés par les rois et les héros les plus prestigieux. Agamemnon, frère de Ménélas et roi de Mycènes, prend la tête de l’expédition. Après toutes sortes de péripéties bien trop longues pour que je les détaille, les troupes (qu’Homère appelle les Achéens, ou les Danaens, ou les Argiens : en gros, des gens de Grèce centrale) arrivent devant Troie et assiègent la ville.

Mais en face, la famille royale de Troade, le roi Priam et la reine Hécube, alignent aussi nombre de héros puissants, parmi lesquels les nombreux princes de Troie fils de Priam. Le plus valeureux d’entre eux est Hector, époux d’Andromaque.

Tous ces éléments sont rappelés petit à petit dans l’Iliade, mais ça peut être plus confortable de les connaître déjà en gros.

Et on en vient à l’Iliade elle-même :

La première chose à savoir sur l’Iliade, c’est que cette épopée ne raconte pas toute la guerre de Troie (qui dure dix ans, ce serait un peu long) mais seulement en gros un mois de la guerre. De plus, l’épisode célébrissime du cheval de Troie n’y est pas raconté, puisqu’à la fin de l’Iliade Troie n’est pas encore prise. Pour lire cet épisode, il faut plutôt aller lire l’Odyssée, où la prise de Troie est rapidement évoquée « en flashback » par un aède, ou bien carrément d’autres épopées (voyez plus loin).

Mais alors, pourquoi lire l’Iliade, dans ce cas ? Parce qu’elle raconte un épisode-clé de la guerre de Troie : l’affrontement entre les deux meilleurs héros de chaque armée, Achille et Hector. Une fois cet affrontement passé, l’issue de la guerre ne fait plus de doutes.

Quand commence l’Iliade, donc, le siège traîne en longueur depuis dix ans et Troie n’est toujours pas prise… c’est alors qu’éclate une querelle intestine au sein de l’armée achéenne, qui pourrait bien décider de l’issue de la guerre.

Achille, fils du mortel Pélée et de la nymphe Thétis, est le plus puissant héros parmi les Achéens. Mais il est de caractère irascible, et, pour le malheur de tous, ne s’entend pas du tout avec le roi Agamemnon. Une querelle de partage de butin éclate entre les deux hommes, et Achille, en colère, se met en grève : il se retire sous sa tente et refuse de combattre.

Du haut de l’Olympe, les dieux contemplent la guerre et décident de donner raison à Achille. Tant qu’il ne combattra pas, le sort de la bataille sera favorable aux Troyens. Or, contrairement aux Troyens retranchés àl’abri dans leur ville, les Achéens n’ont qu’assez peu de protections : de simples campements le long du rivage, protégeant l’accès aux navires de la flotte qui les a amenés jusqu’à Troie et qui est pour beaucoup leur seul moyen de rentrer chez eux. Si les Troyens prennent l’avantage, ils pourraient bien atteindre les navires et les incendier, puis massacrer les troupes achéennes…

Pour que les Achéens reprennent l’avantage, il faudra donc qu’Achille reprenne les armes. Dans quelles conditions il le fera, c’est ce que l’Iliade détaille.

Toute l’Iliade est centrée sur Achille, de même que l’Odyssée est centrée sur Ulysse. Mais les deux héros sont très différents. Achille est le héros guerrier par excellence : attaché aux prouesses et à la recherche de la gloire, sûr de sa valeur et de ses droits, courageux mais emporté. Il a d’énormes qualités et de graves défauts. Sa colère lui coûte la vie de son compagnon le plus cher, Patrocle, qui tente de combattre à sa place. Achille revient alors au combat pour venger Patrocle, et affronte enfin son plus grand ennemi, Hector.

Le premier tome de l’Iliade dans la Collection des universités de France (les « Budé »), la principale collection publiant des éditions scientifiques de textes antiques grecs et latins (et byzantins, et chinois… mais c’est une autre histoire).

Mon avis :

L’Iliade est l’archétype de l’épopée guerrière. C’est une succession de combats, de trêves, de conseils de guerre. Elle est pleine de la mentalité grecque archaïque, avec sa conception de la gloire. Mais elle reste profondément humaine, au sens où la gravité de la mort et la douleur du deuil ne sont jamais occultés au profit d’une exaltation naïve de la guerre. Achille, malgré sa grande puissance, est un homme mortel comme tous les autres. Il en est conscient, mais la mort de Patrocle le transforme profondément. Il y a des scènes bouleversantes. Et autour d’Achille, c’est tout l’univers de la guerre de Troie qui se déploie : chaque héros a son caractère et sa façon de parler, il y a les forts, les habiles en paroles, les sages, les lâches…

Dans l’Iliade, le merveilleux est beaucoup moins présent que dans l’Odyssée : il repose surtout sur les apparitions des dieux (et donne lieu vers la fin à une scène de combat superbe avec Achille). J’ai tendance à préférer les épopées moins « low fantasy », celles où on a droit à des créatures surnaturelles, à de la magie, etc. Cela dit, il y en a ici aussi, mais plus discrètes, et ça fonctionne bien aussi.

J’avoue une légère préférence pour l’Odyssée, parce qu’il est plus facile de se sentir proche d’Ulysse que d’Achille, et aussi parce que la morale et les valeurs sociales de l’Iliade ont moins bien vieilli que celles de l’Odyssée (l’absence de personnages féminins très actifs, le côté très macho de Zeus, etc.).
L’Odyssée a aussi l’avantage de montrer un univers plus varié, allant des pays lointains à l’univers domestique du porcher Eumée et du palais d’Ulysse, etc. alors que l’Iliade se déroule entièrement à Troie et sur le champ de bataille à côté, et montre un univers essentiellement martial.

Mais les deux épopées ne racontent absolument pas la même chose, et chacune est impeccablement construite. De ce point de vue l’Iliade, comme l’Odyssée, a toujours des leçons à donner aux auteurs de romans : tout est impeccablement structuré et rythmé. La littérature européenne est en bonne partie sortie de là, et ça se voit !

La récente traduction par Philippe Brunet, parue au Seuil en 2011.

Quelle édition, quelle traduction ?

Il vaut mieux lire l’Iliade dans une édition avec introduction et notes, histoire d’avoir les explications nécessaires pour bien comprendre les noms des personnages, les généalogies, les allusions aux peuples, etc. Inutile de s’obliger à lire tout : l’essentiel est de pouvoir vous y reporter en cas de besoin.

Il existe plusieurs traductions de bonne facture. Un mot sur quelques-unes :

– Celle de Paul Mazon, faite pour l’édition scientifique de l’Iliade aux Belles Lettres, est une traduction en prose classique, carrée, solide, et elle est reprise dans des éditions de poche.

– L’une des dernières traductions en date est celle de Philippe Brunet, parue au Seuil l’an dernier. Elle est en vers libres, sans rimes, qui travaillent sur le rythme de la langue pour tenter de trouver un équivalent au rythme des vers grecs antiques (l’Iliade est composée en hexamètres). D’après les bouts que j’en ai lus, elle n’est pas parfaite, mais elle a l’air pas mal.

– Attention à la traduction de Leconte de Lisle, qui date du XIXe siècle et est parfois utilisée par des éditeurs par facilité parce qu’elle est désormais libre de droits : elle est assez peu accessible, transcrit tels quels les noms propres grecs et certains noms communs (au lieu de « Achille et les Achéens aux belles jambières », on  » Akhilleus et les Akhéens aux belles cnémides » : si vous comprenez et que vous aimez bien, allez-y, sinon commencez par une traduction plus limpide…).

Pour les plus jeunes…

Pour faire découvrir en douceur ce classique aux enfants, il y a aussi des éditions abrégées ou bien des réécritures illustrées parues dans des collections jeunesse. Je trouve par exemple les Contes et récits tirés de l’Iliade et de l’Odyssée de G. Chandon en Pocket junior, ou bien L’Iliade et L’Odyssée par Jean Martin dans la collection « Contes et légendes » de Nathan. Et il y en a encore d’autres.

Si vous avez aimé, vous pouvez aller voir aussi…

L’Odyssée, tout bêtement : c’est la suite ! Une aventure radicalement différente, mais on y retrouve de nombreux héros de l’Iliade, et l’on découvre leurs destins mouvementés, parfois tragiques.

L’Énéide de Virgile est une épopée romaine qui fait la transition entre l’univers de la guerre de Troie et les origines de Rome. Énée, prince de Troie, quitte sa ville avec quelques survivants et part en quête d’un pays où fonder une nouvelle Troie : ce sera l’Italie, mais, après un voyage périlleux, il va devoir affronter les peuples locaux et le courroux de Junon avant de pouvoir s’y installer.

L’épopée contient un flashback qui raconte la ruse du cheval de Troie et la prise de la ville du point de vue d’Énée : c’est magnifique, saisissant, et le reste est largement à la hauteur. La fin, notamment, contient des combats qui n’ont pas grand-chose à envier à Homère.

– Moins connu : la Suite d’Homère de Quintus de Smyrne, une épopée qui raconte… la suite de l’Iliade, jusqu’à la prise de Troie, et aussi les retours chez eux des héros Achéens, et se termine avec le départ d’Ulysse. Le texte assure donc une transition entre l’Iliade et l’Odyssée. C’est complètement le même genre d’univers et d’ambiance que l’Iliade. En français, le texte se trouve sur Internet sans problème, dans des traductions anciennes, par exemple sur Remacle.org. En édition papier, ça n’existe à ma connaissance qu’en Budé, aux Belles Lettres, donc plutôt à lire ou emprunter en bibliothèque, car ce sont des volumes assez chers (même si très bien faits).

– Nettement plus récent et dans un genre différent, David Gemmell a écrit une trilogie « Troie », laissée inachevée à sa mort et terminée par sa femme Stella. Pas encore lu.

– Et en science-fiction, il y a aussi Ilium et Olympos, de Dan Simmons, improbable mélange brassant Homère, Proust, Shakespeare, et je dois en oublier. Pas encore lu.

« Moi j’ai vu Troie, le film avec Brad Pitt en Achille, et j’ai bien aimé. Quel est le rapport avec l’Iliade ? C’est fidèle ? »

Troie, le film hollywoodien de Wolfgang Petersen sorti en 2004 avec Brad Pitt dans le rôle d’Achille et Eric Bana en Hector, est une porte d’entrée possible vers l’Iliade, mais c’est avant tout un film hollywoodien qui s’inspire très librement de son sujet de départ :

– D’abord, le film n’est pas une adaptation directe de l’Iliade : il raconte toute la guerre de Troie, c’est-à-dire l’ensemble du sujet couvert par l’ancien cycle d’épopées dit « Cycle troyen », en sabrant naturellement plein de détails parce qu’il y a une quantité de héros et de péripéties énorme. Mais le milieu du film reprend l’intrigue de l’Iliade, ce qui explique qu’Achille et Hector, et les héros de l’Iliade en général, y tiennent des rôles importants.

– LA grosse différence : dans Troie, on ne voit pas les dieux ! Le film prend le parti de réaliser une sorte d’adaptation historiquement vraisemblable des événements de la guerre. Mais doit quand même garder des éléments très mythologiques et pas très vraisemblables, comme le cheval de Troie. D’où un résultat un peu contradictoire par moments… Personnellement je trouve qu’on y perd : la guerre de Troie sans les dieux qui surveillent les héros et bondissent de l’Olympe pour les aider ou leur mettre des bâtons dans les roues, ce n’est plus vraiment la guerre de Troie…

– Il y a plusieurs énormes écarts avec les événements de la « vraie » guerre de Troie. Certains héros meurent dans le film de façons complètement différentes, ou survivent, ou ne sont pas là du tout, etc.

– Beaucoup de combats dans le film n’ont pas grand-chose à voir avec la façon dont les héros de l’Iliade se battent.

Cela dit, considéré comme une oeuvre originale, ça se laisse regarder, et ça ne manque pas d’un certain souffle épique, même si c’est nettement différent des épopées homériques. Ce qui est bien rendu dans le film par rapport à l’Iliade, c’est la soif de gloire d’Achille et sa volonté de marquer les mémoires après sa mort, et l’opposition entre les caractères d’Achille et d’Hector.

Bref, ça peut être un bon moyen d’entrer dans l’univers de la guerre de Troie… mais ça n’est pas très fidèle à l’Iliade et à l’Odyssée : mieux vaut lire les livres pour vous en faire une meilleure idée.


L’épopée de Gilgamesh

27 juillet 2012

L’édition de Jean Bottéro, dans la collection L’aube des peuples, chez Gallimard.

C’est une critique-présentation d’un grand classique : si vous n’y connaissez rien, restez, c’est fait pour !

L’histoire :

Et donc, l’épopée de Gilgamesh, ce sont ces aventures légendaires d’un roi de Mésopotamie écrites en akkadien dans un syllabaire cunéiforme sur douze tablettes quelque part vers 1700-1600 avant J.-C. (pour comparaison, l’Iliade et l’Odyssée, c’est vers 800-750 av. J.-C.), perdues depuis, retrouvées en 1853, traduites en 1873 par George Smith, et qui font de nouveau rêver l’humanité entière…

Gilgamesh, roi de la ville mésopotamienne d’Ourouk, a deux tiers de sang divin dans les veines et n’est mortel que pour un tiers seulement. Roi puissant, doté d’une force surhumaine, il accomplit exploit sur exploit, mais son orgueil effréné finit par inquiéter les dieux. Pour le calmer, ceux-ci lui envoient un adversaire à sa taille : c’est Enkidu, l’homme sauvage.

Enkidu et Gilgamesh, après s’être affrontés, finissent par se lier d’une amitié indéfectible, et accomplissent ensemble des exploits plus grands encore. Mais Ishtar, déesse de l’amour et de la guerre, dont Gilgamesh a repoussé les avances, va envoyer aux deux amis des épreuves ardues, et va finir par s’attaquer à Enkidu lui-même pour affaiblir indirectement Gilgamesh. Frappé par une maladie mystérieuse, Enkidu dépérit et finit par mourir. Le grand Gilgamesh, jusqu’à présent invincible, découvre brutalement la mort ; à travers celle de son ami, il est désagréablement rappelé à sa propre mortalité.

Gilgamesh entreprend alors un voyage jusqu’au bout du monde, dans l’espoir de découvrir un moyen de devenir immortel…

Mon avis :

L’épopée de Gilgamesh est nettement plus courte que des classiques comme l’Iliade ou l’Odyssée. Elle a aussi été plus abîmée par le temps, puisqu’il en manque quelques passages, mais, pour un poème vieux de plus de 3500 ans, elle ne se porte pas si mal ! Depuis la redécouverte du texte, il y en a eu plusieurs éditions (certaines regroupant le texte le plus connu avec plusieurs autres versions et épisodes de la légende de Gilgamesh) et d’innombrables adaptations et réécritures, mais le texte original n’a rien d’inaccessible.

Or c’est une histoire limpide, rythmée, riche en péripéties et en éléments merveilleux, et qui combine une aventure extraordinaire avec une réflexion sur la condition humaine. On y trouve aussi le plus vieux récit du Déluge (bien avant les déluges des autres mythologies puis des textes sacrés des grands monothéismes).

Le texte est d’autant plus accessible qu’il a été édité il n’y a pas si longtemps par Jean Bottéro (mort il y a quelques années), qui n’avait pas son pareil pour écrire des livres et des articles à la fois rigoureux et extrêmement clairs, accessibles sans difficulté au grand public. Il a notamment publié une traduction de l’épopée chez Gallimard dans la collection « L’aube des peuples ». C’est dans cette édition que j’ai découvert ce beau texte.

Il y a aussi une autre édition savante aux éditions du Cerf (qui réalise pas mal d’éditions scientifiques de textes antiques), mais je ne l’ai jamais eue en main.

Bref, si vous êtes un peu curieux de lire le texte antique et pas simplement une de ses nombreuses adaptations plus ou moins libres, je ne peux que vous conseiller de mettre le nez dans une traduction du texte original : la narration est rapide, les péripéties nombreuses, l’ensemble est assez court, et les traductions actuelles sont accessibles, alors autant en profiter pour faire carrément le voyage dans le temps.

L’édition parue aux éditions du Cerf.

Si vous avez aimé, il y a aussi…

Gilgamesh, roi d’Ourouk, de Robert Silverberg, un roman de fantasy historique qui s’inspire de très près de l’épopée mésopotamienne, mais en fait une réécriture « rationalisée ». Le résultat m’a un peu déçu, justement parce que je n’y retrouvais pas la dimension merveilleuse du texte original. Mais Silverberg a une belle écriture et s’est visiblement documenté. J’ai fait une critique plus détaillée de ce roman ici même.

– Il y a aussi eu plusieurs adaptations en BD récemment : l’une, complète, en deux tomes, de De Boneval et Duchazeau, chez Glénat, titrée simplement Gilgamesh, avec un style graphique relativement sobre et qui s’intéresse à la psychologie de Gilgamesh ; l’autre, inachevée, L’épopée de Gilgamesh par Blondel et Brion chez Soleil, dans un style graphique plus « heroic fantasy à grand spectacle » (seul le premier tome, Le trône d’Uruk, est paru, puis la série a été interrompue).

– … et il commence à y avoir une foultitude d’adaptations en albums illustrés pour la jeunesse. Si vous voulez faire découvrir cette belle épopée mythologique à des enfants, il y a ce qu’il faut, il suffit de chercher un peu ! (Je n’ai pas de référence en particulier, par contre, n’ayant pas encore eu l’occasion d’en feuilleter un en détail.)


Jean-Pierre Chambon, « Trois rois »

19 juillet 2012

Forum Le Coin des Lecteurs, 20 octobre 2011.

Trois Rois, de Jean-Pierre Chambon, a été publié en 2009 par un petit éditeur, Harpo &.

Quatrième de couverture :

Les voies par lesquelles nous sont parvenus les manuscrits afférents aux trois rois nous demeurent inconnues.

Mon avis :

Je ne connaissais ni l’auteur ni l’éditeur (après recherche, ni l’un ni l’autre n’en étaient à leur coup d’essai). J’ai croisé ce livre par hasard dans une librairie. C’est un livre de format moyen, plus haut que large, avec une couverture cartonnée souple, rouge, où le titre est écrit en noir et le nom de l’auteur et de l’éditeur en doré. Le titre est écrit horizontalement mais aussi verticalement, ce qui permet un jeu typographique sur les deux mots « Trois rois ». (J’écris tout ça sans mettre d’image parce que je n’en trouve pas sur le Web, sauf sur cette unique critique, mais je n’arrive pas à récupérer l’adresse de l’image donc il faudra aller la voir là-bas.)
Le papier et les fontes employés rendent très bien, et c’est en partie ça qui m’a fait craquer pour un livre par ailleurs cher (20 euros pour environ 70 pages dont la moitié de poésie : de quoi faire fuir les tenants du rapport prix/volume de lecture, surtout si l’on n’a pas un peu d’indulgence pour les petits éditeurs qui tirent à peu d’exemplaires). Mais après lecture, je ne regrette pas ce coup de coeur.

Trois rois est un livre hybride, qu’on peut considérer comme un recueil de poèmes ou de récits et de fragments : la première moitié du livre est constituée de poèmes en vers libres, tandis que la seconde regroupe des textes de quelques pages chacun qui tiennent un peu du récit et un peu du poème en prose ou du morceau de belle prose. Cependant, si je classe ce livre en « Fantasy et imaginaire », c’est surtout parce qu’il développe un univers imaginaire – même s’il le fait d’une façon différente du pavé romanesque de fantasy moyen. Trois rois est plus proche de ces univers qui valent avant tout pour leur ambiance et leur mystère. Quelque chose dans le goût du Rivage des Syrtes (pour l’univers imaginaire proche du réel et au cadre assez imprécis) ou des Cités obscures (pour le concept d’un univers présenté par petits aperçus).

Le livre se présente comme l’édition par un historien d’un ensemble de manuscrits et d’inscriptions réalisés par (ou pour) trois rois antiques. Hormis quelques rares allusions au monde réel dans l’introduction et dans une ou deux notes, le cadre général reste très vague, mais l’atmosphère est celle du Proche-Orient antique, celui de l’Assyrie, de la Mésopotamie ou bien de la Bible de l’Ancien Testament (celle de Salomon et de la reine de Saba). Après la courte introduction, on plonge dans les textes des inscriptions, qui ne sont autres que des poèmes courts.

Ce que j’ai beaucoup apprécié dans ces poèmes, c’est la façon dont ils posent peu à peu une atmosphère et un univers cohérent, tout en constituant en même temps des poèmes autonomes très honorables (l’inspiration antique est visible, mais on pense aussi parfois aux haikus japonais). Après les inscriptions des trois rois vient l’inscription trouvée sur le peigne de la reine Zélia, une jolie trouvaille comme on en retrouve plusieurs autres dans la suite.
La seconde moitié du recueil est donc constituée par de courts textes en prose, et c’est là qu’on plonge plus nettement dans le merveilleux (un merveilleux très susceptible de plaire à des lecteurs de fantasy). Après des souvenirs de la reine Zélia, qui contiennent plusieurs épisodes fantastiques, trois textes sont consacrés aux châteaux de chacun des trois rois, tous uniques en leur genre (dire pourquoi reviendrait à vous gâcher le plaisir de la découverte) ; ces textes sont émaillés de belles idées.

L’ensemble reste court, et laisserait sans doute sur sa faim un lecteur habitué à ne jamais pénétrer dans un univers sans l’épuiser complètement par l’intermédiaire de nombreux volumes. Il faut être amateur de formats courts. Personnellement, je les apprécie beaucoup, et je trouve que cela apporte une intensité (et une… poésie) que n’ont pas les pavés habituels. J’aime toujours aussi le principe de présenter un univers par l’intermédiaire d’une série de « documents » qui laisse au lecteur toute liberté d’assembler les pièces et de rêvasser sur l’ensemble à sa façon.
Certes, le résultat n’est pas parfait. Certains poèmes, certains passages de prose auraient pu être encore mieux ciselés. Peut-être que l’univers aurait mérité d’être un peu plus étoffé malgré ce parti pris de brièveté. Mais c’est une belle tentative, originale, rafraîchissante et déjà très appréciable. Et elle donne envie d’aller voir ce que l’auteur a publié d’autre…