L’épopée de Gilgamesh

L’édition de Jean Bottéro, dans la collection L’aube des peuples, chez Gallimard.

C’est une critique-présentation d’un grand classique : si vous n’y connaissez rien, restez, c’est fait pour !

L’histoire :

Et donc, l’épopée de Gilgamesh, ce sont ces aventures légendaires d’un roi de Mésopotamie écrites en akkadien dans un syllabaire cunéiforme sur douze tablettes quelque part vers 1700-1600 avant J.-C. (pour comparaison, l’Iliade et l’Odyssée, c’est vers 800-750 av. J.-C.), perdues depuis, retrouvées en 1853, traduites en 1873 par George Smith, et qui font de nouveau rêver l’humanité entière…

Gilgamesh, roi de la ville mésopotamienne d’Ourouk, a deux tiers de sang divin dans les veines et n’est mortel que pour un tiers seulement. Roi puissant, doté d’une force surhumaine, il accomplit exploit sur exploit, mais son orgueil effréné finit par inquiéter les dieux. Pour le calmer, ceux-ci lui envoient un adversaire à sa taille : c’est Enkidu, l’homme sauvage.

Enkidu et Gilgamesh, après s’être affrontés, finissent par se lier d’une amitié indéfectible, et accomplissent ensemble des exploits plus grands encore. Mais Ishtar, déesse de l’amour et de la guerre, dont Gilgamesh a repoussé les avances, va envoyer aux deux amis des épreuves ardues, et va finir par s’attaquer à Enkidu lui-même pour affaiblir indirectement Gilgamesh. Frappé par une maladie mystérieuse, Enkidu dépérit et finit par mourir. Le grand Gilgamesh, jusqu’à présent invincible, découvre brutalement la mort ; à travers celle de son ami, il est désagréablement rappelé à sa propre mortalité.

Gilgamesh entreprend alors un voyage jusqu’au bout du monde, dans l’espoir de découvrir un moyen de devenir immortel…

Mon avis :

L’épopée de Gilgamesh est nettement plus courte que des classiques comme l’Iliade ou l’Odyssée. Elle a aussi été plus abîmée par le temps, puisqu’il en manque quelques passages, mais, pour un poème vieux de plus de 3500 ans, elle ne se porte pas si mal ! Depuis la redécouverte du texte, il y en a eu plusieurs éditions (certaines regroupant le texte le plus connu avec plusieurs autres versions et épisodes de la légende de Gilgamesh) et d’innombrables adaptations et réécritures, mais le texte original n’a rien d’inaccessible.

Or c’est une histoire limpide, rythmée, riche en péripéties et en éléments merveilleux, et qui combine une aventure extraordinaire avec une réflexion sur la condition humaine. On y trouve aussi le plus vieux récit du Déluge (bien avant les déluges des autres mythologies puis des textes sacrés des grands monothéismes).

Le texte est d’autant plus accessible qu’il a été édité il n’y a pas si longtemps par Jean Bottéro (mort il y a quelques années), qui n’avait pas son pareil pour écrire des livres et des articles à la fois rigoureux et extrêmement clairs, accessibles sans difficulté au grand public. Il a notamment publié une traduction de l’épopée chez Gallimard dans la collection « L’aube des peuples ». C’est dans cette édition que j’ai découvert ce beau texte.

Il y a aussi une autre édition savante aux éditions du Cerf (qui réalise pas mal d’éditions scientifiques de textes antiques), mais je ne l’ai jamais eue en main.

Bref, si vous êtes un peu curieux de lire le texte antique et pas simplement une de ses nombreuses adaptations plus ou moins libres, je ne peux que vous conseiller de mettre le nez dans une traduction du texte original : la narration est rapide, les péripéties nombreuses, l’ensemble est assez court, et les traductions actuelles sont accessibles, alors autant en profiter pour faire carrément le voyage dans le temps.

L’édition parue aux éditions du Cerf.

Si vous avez aimé, il y a aussi…

Gilgamesh, roi d’Ourouk, de Robert Silverberg, un roman de fantasy historique qui s’inspire de très près de l’épopée mésopotamienne, mais en fait une réécriture « rationalisée ». Le résultat m’a un peu déçu, justement parce que je n’y retrouvais pas la dimension merveilleuse du texte original. Mais Silverberg a une belle écriture et s’est visiblement documenté. J’ai fait une critique plus détaillée de ce roman ici même.

– Il y a aussi eu plusieurs adaptations en BD récemment : l’une, complète, en deux tomes, de De Boneval et Duchazeau, chez Glénat, titrée simplement Gilgamesh, avec un style graphique relativement sobre et qui s’intéresse à la psychologie de Gilgamesh ; l’autre, inachevée, L’épopée de Gilgamesh par Blondel et Brion chez Soleil, dans un style graphique plus « heroic fantasy à grand spectacle » (seul le premier tome, Le trône d’Uruk, est paru, puis la série a été interrompue).

– … et il commence à y avoir une foultitude d’adaptations en albums illustrés pour la jeunesse. Si vous voulez faire découvrir cette belle épopée mythologique à des enfants, il y a ce qu’il faut, il suffit de chercher un peu ! (Je n’ai pas de référence en particulier, par contre, n’ayant pas encore eu l’occasion d’en feuilleter un en détail.)

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